Si le printemps fut plutôt silencieux dans les pinceaux de l’atelier, l’automne qui se prend pour l’été fait entendre de nouveau ses bruissements colorés. Quelques rangements sous la verrière ont fait un (petit) peu de place pour accueillir ardoises, papiers de soie collés, branches peintes en jaune lumière et autres aiguilles d’acupuncture piquant la toile de mon monde de peinture… C’est à suivre… et à laisser venir doucement. Il s’agit toujours de Peindre Le Ciel, même si au cours de l’été ce tableau-programme-d’une-vie a quitté l’atelier et trouver refuge ami pas loin des bords de l’Atlantique. Et d’autres sont en quête d’éventuels acquéreurs sur le site de vente en ligne Artsper, celui-là même qui avait permis l’heureux voyage en Belgique de La Roue du Temps.
https://www.artsper.com/fr/oeuvres-d-art-contemporain?query=do%20delaunay
J’ai eu récemment l’honneur et le plaisir d’être juré dans le festival de documentaires Écrans de Chine. Belle immersion le temps d’un long week-end dans les regards multiples et croisés sur ce pays. Dans les membres du jury, il y avait un journaliste français d’origine chinoise auteur d’un livre paru cette année aux éditions de l’Aube : La société de surveillance made in China. Vertige ! Au palmarès: Ayi, et deux mentions spéciales à H6 et Chine, une histoire intime. https://www.ecransdesmondes.org/ecrans-de-chine/
Vous souvenez-vous de l’éruption du volcan Hunga Tunga survenue le 15 janvier 2022 dans le sud-ouest du Pacifique, la plus puissante jamais enregistrée depuis que l’humain mesure l’activité volcanique de la planète. Non ?
Pour vous rafraîchir la mémoire allez à https://www.arte.tv/fr/videos/111679-000-A/hunga-tonga-la-colere-du-volcan-des-abysses/ Impressionnant !!!
Cessons de parler de climato-sceptiques ! Ce sont tout bonnement des climato-j’m’en-foutistes. J’ai encore en mémoire le bruit de la chute d’un bout de montagne lors de la randonnée tarentaise. Vous pouvez l’entendre dans la quatrième image de cette chronique.
Je vous avais laissé en septembre au seuil de la lecture de La Plus Secrète Mémoire des hommes, roman de Mohamed Mbougar Sarr, prix Goncourt 2021. Cette lecture parfois difficile mais néanmoins d’une profonde et dense richesse m’a embarqué dans ses multiples méandres et abîmes. Plus aisée fut celle de De purs hommes, du même auteur qui aborde le motif de l’homosexualité au Sénégal. Dans le foisonnement abyssal de La plus secrète mémoire… j’ai bien aimé ce passage : « Alors tu sais aussi que dans notre tradition sérère, aucun nom n’est donné par hasard ( …) Il n’est pas seulement un symbole, mais un signe pour l’existence. Il dit quelque chose de l’être qui le porte… il le guide, il montre le chemin… »
Ce soir je pourrai m’appeler « D’eau, de l’eau naît ». Une soif de création sans faim et sans fin.
Parce que La Roue du Temps tourne toujours dans un coin de ma tête (et hélas aussi dans mes lombaires ou mes genoux), je suis toujours intéressé par ce que la science dit du Temps, de sa perception et de son écoulement. J’ai prêté l’oreille à une émission avec Carlo Rovelli, éminent physicien et philosophe des sciences qui vient de publier un livre intitulé Trous Blancs. Je me souviens avoir écrit dans les lignes de ces Nouv’ailes, il y a quelques années, une phrase en forme de blague qui disait « les trous noirs, c’est troublant ». La réalité a rattrapé l’humour de la fiction. Mais avant de plonger dans ce trou blanc, je vais ouvrir les pages d’un de ses ouvrages précédents : L’Ordre du Temps. Tout un programme… Au fil de cette émission, j’ai eu écho d’une proposition que ce scientifique italien vivant à Marseille avait fait avec d’autres confrères : « Si l’on réduisait simultanément de 2% chaque année sur 5 ans, les budgets militaires de tous les pays, on aurait de quoi financer les remèdes à la problématique climatique de notre époque ». Mais cette utopique proposition émise juste avant la guerre d’Ukraine a fait long feu. Ou plutôt non, tant cette expression qui signifiait à l’origine « durer longtemps » peu aussi se traduire par « ne pas durer longtemps ». Bel exemple d’énantiosémie, soit deux sens opposés pour une même expression.
Vibré à la lecture de Dans la lumière des peintres d’Adrien Maeght qui conte la belle aventure de cette galerie et de sa fondation à Saint Paul de Vence. Plaisir d’y croiser le quotidien et l’amitié des quelques grands peintres comme Braque ou Miro, avec une tendre préférence pour l’homme et l’artiste majeur qu’est pour moi Pierre Bonnard.
Découvert la belle écriture d’une jeune autrice, Laurine Roux, professeur de lettres dans les Hautes Alpes à travers son premier roman Une immense sensation de calme, belle et intense histoire de mort et d’amour dans ce qui pourrait être une Sibérie lointaine où une guerre n’aura laissé debout que des parias et des Invisibles. Son plus récent, L’autre moitié du monde nous entraine dans les années 20, dans le delta de l’Ebre, entre révolte et servage. Et séduit par cette langue sensible, imagée, réaliste et poétique : « …Elle est saisie de panique, se met à courir veste serrée contre elle, comme si le tissu pouvait retenir les caresses et la nuit (…) Le sang tombe dans les jambes de Toya. »
Le silence et la colère. C’est le deuxième tome de la tétralogie de Pierre Lemaître consacrée aux Trente Glorieuses. Dans les années 50, l’histoire d’un village inondé pour cause de barrage hydroélectrique s’entremêle avec la chasse aux femmes qui pratiquaient clandestinement des avortements et à celles qui les subissaient. Cette actualité qui n’en est plus une en France, mais hélas l’est encore dans bien des pays du monde, est venue percuter les émotions intenses ressenties à la vision de l’exposition de Nicolas de Staël qui se tient au Musée d’Art Moderne de la Ville de Paris jusqu’au 21 janvier prochain. Jeannine, la première femme de ce peintre d’origine russe, est décédée en 1946 des suites d’un avortement. Et il est probable que l’avortement d’une de ses dernières compagnes, Jeanne, l’ait poussé à sauter du rempart de la vieille cité d’Antibes un matin de mars 1955. Heureusement il nous reste sa peinture à laquelle cette ample exposition rend merveilleusement grâce.
Côté cinéma, beaucoup de films vus ce mois-ci mais il en est un, reçu dans les yeux et le cœur hier soir, qui plane haut dans le ciel de mes écrans. Je n’en dirai rien de plus, pas trouvé de mots à la hauteur, si ce n’est cette formule impérative : allez le voir ! C’est Le Règne Animal de Thomas Cailley.
Si vous redescendez du Règne Animal, vous pouvez y ajoutez Nos Corps de Claire Simon, Toni en Famille de Nathan Ambrosioni et Le Procès Goldman de Cédric Kahn.
J’espère que ces quelques lignes vous auront été Bonnes Nouv’ailes.
do 91023
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