C’est le nom que l’on donne à ces rassemblements d’oiseaux qui dessinent dans les nues ces volutes mouvantes si belles qu’on en reste sans voix. Si majestueuses qu’on ne peut qu’en interroger le mystère et s’émerveiller devant ce phénomène d’intelligence collective dont vous pouvez voir un exemple dans la quatrième image de ces Nouv’ailes captée il y a quelques jours dans le port de Saint-Nazaire.
Murmuration, cela résonne comme un son qui serait encore plus feutré qu’un simple murmure. Un souffle qui frôlerait le mur du silence. Exactement le contraire du cri tonitruant qui voulut sortir de ma gorge au matin du 24 février. Et qui ne cesse pas. Et dont je n’écrirai rien de plus, tellement l’horreur est profonde. Je laisserai juste dans la première image de cette chronique le vent souffler dans les plis jaune et bleu du drapeau ukrainien qui rime avec européen.
Dire qu’on ne sait toujours pas pourquoi on entend la mer en écoutant les coquillages ! Peut-être que les oiseaux le savent ?
En rentrant de ce bord de mer, devisant avec un ami-frère à propos de nos chansons préférées, accord se fit au bord de la chaleureuse cheminée, sur le poème d’Antoine Pol, Les Passantes mis en musique par Brassens et repris par Cabrel et Le Forestier et … par une fanfare sud-américaine que la radio diffusa juste à ce moment-là ! Une telle synchronicité ne fait pas preuve, mais quand même, Les Passantes, c’est vraiment la crème des crèmes des belles chansons !
Rien de tel pour conjurer la plombante actualité que l’art et la création. Surtout quand il et elle sont fortement dynamisées par l’annonce de ma sélection pour VIGN’ART 2022 avec le projet L’ARBRE À MIROIRS, décrit dans l’image n°2. Il sera installé fin avril ou début mai dans les vignes champenoises du site de Chavot-Courcourt, au sud d’Épernay. En attendant, je participe la semaine prochaine avec plus d’une vingtaine d’artistes à l’exposition Le Printemps des Poètes qui se tiendra à la Galerie du Génie de la Bastille du 15 au 20 mars. Cette année, le thème est L’ÉPHÉMÈRE. Je serai présent à la Galerie lors du vernissage, le mercredi 16 à 18h et le vendredi 18 mars, de 17 à 20h.
J’avais beaucoup aimé Le Dernier Lapon, roman ethno-policier d’Olivier Truc. J’ai adoré la suite, Le Détroit du Loup. Où l’on continue de débusquer derrière la belle image social-démocrate de la Suède à la rigueur toute protestante, les ravages que celle-ci a infligés à la culture sami pour l’éradiquer du grand nord scandinave. Mais l’encore plus grande émotion de lecture de ce mois fut celle de Je suis pilgrim de l’anglo-australien Terry Hayes qui est aussi scénariste. Entre polar et espionnage, djihadisme et menace chimique, Échelon et variole, entre New York et Afghanistan, Turquie et Arabie Saoudite, une formidable construction narrative, addictive et haletante… Chaudement recommandé !!!
Côté film, arrive en premier Un Autre Monde de Stéphane Brizé. Échangeant quelques mots avec mon inconnu voisin de séance, nous nous réjouîmes de concert d’avoir échappé au monde de l’entreprise… En espérant ne jamais être malade du côté de Shanghaï, où pendant plusieurs mois, la franco-chinoise Yé Yé a suivi dans son documentaire H6 cinq familles soignées dans un des plus grands hôpitaux de cette ville. Entre modernité et tradition, humour, détresse et solidarité, un étonnant portrait de cet univers médical chinois. J’ai aussi vu et aimé Histoire d’un scandale d’État de Thierry de Peretti, le très beau conte italien Piccolo Corpo autour de la maternité et de la rédemption et la toujours impeccable Adèle Exarchopoulos, hôtesse de l’air d’une compagnie low-cost dans « Rien à Foutre » d’ Emmanuel Marre et Julie Lecoutre. Je ne connaissais rien d’Ulrich Zwingli, réformateur suisse contemporain de Luther et Calvin que j’ai découvert dans le film éponyme de Stefan Haupt. Dans un film, en particulier dans les documentaires, je me demande souvent où était placée la caméra au moment de la prise de vue. Quels artifices furent pris pour donner l’illusion d’un « sur le vif ». Ceci est particulièrement vrai dans le « cadre » des documentaires animaliers et des prouesses de captation qu’ils suggèrent. C’est le cas dans le film Le Chêne qui explore la vie dans, autour et sous les racines et branches de ce roi de la forêt.
En Chine Ancienne, il était dit que les oiseaux étaient une belle image de l’adéquation au moment puisque possédant un degré de liberté de plus que nous – le vol – ils se posaient toujours là où il le devaient. Aujourd’hui où les drôles de drones qui décollent permettent de voir le monde depuis le haut du ciel, gagnera-t-on un vrai degré de liberté ?
Au vu de l’actualité, on ne le croirait pas mais nous sommes bien désormais en l’an 22 du 21ème siècle. J’espère que vous avez bien fêté le palindrome du 22022022. Le prochain est prévu pour le 03022030… Pour parler d’une époque lointaine, on évoque souvent « la nuit des temps ». Mais c’est quand, « LA NUIT DES TEMPS » ? La réponse est dans son anagramme : c’est « DEMAIN, PLUS TEST ».
Là où les Lettres à Ailes lisent dans les Îles des Êtres
Nouv’aile du 9 février 2022
J’ai six ans. Peut-être sept.
Je suis en vacances avec sœur et cousins dans la maison des grands parents maternels, à Feneu, petit village de campagne à une douzaine de kilomètres d’Angers, devenu aujourd’hui zone périurbaine.
Il y a là aussi mon oncle Henri, dit Riton, qui est aussi mon parrain. C’est un grand bonhomme costaud qui adore raconter des histoires et nous emmener en balade dans les bois environnants à la recherche de cow-boys rêvés ou d’indiens imaginaires.
Un jour au retour d’une de ces balades, il me dit qu’il est capable de faire disparaître un œuf sur ma tête. Moi petit garçon curieux et naïf, j’acquiesce à cette alléchante proposition et me voilà debout au centre d’une grange à la lumière tamisée appelée l’armise – j’apprendrais plus tard qu’il s’agissait en fait de « la remise » – avec un œuf sur le sommet de la tête recouverte d’un mouchoir. Sous les cris des cousins mon oncle fait grands gestes et incantations en tournant autour de moi en comptant jusqu’à trois. À trois…. il aplatit vigoureusement sa main sur le sommet de mon crâne… Je ne me souviens plus des réactions des cousins qui devaient éclater de rire et me voilà tout penaud allant voir ma grand mère pour me faire nettoyer, laquelle m’administrera une gentille calotte pour avoir gaspiller un précieux œuf…
J’oublierai cette anecdote enfantine. Elle rejaillira de ma mémoire quelques décennies plus tard, quand mêlant mes blancs pinceaux aux jaunes de la pensée chinoise, je dessinerai mes premières dispositives d’œufs – ce par quoi un dispositif peut se reproduire.
Qui peut dire ce que fut ce parrainage blagueur dans les hasards d’une trajectoire d’artiste?-? Aujourd’hui un facétieux clin d’œil -un clin d’œuf ?- et à tout le moins l’opportunité de vous partager en noir et blanc quelques images de ces installations fragiles qui sont une part importante de mon travail, pierres de poésie sensible posées sur la surface du monde qui marche sur des œufs…
« Ne pas douter de sa vocation, mais douter dans sa vocation. »
L’atelier est dans son rythme d’hiver, entre la préparation des réponses aux appels à projets devant la planche à dessin, l’aquarelle et l’ordi au premier étage et la lente gestation des tableaux au rez de chaussée. Tout sera prêt pour la prochaine exposition qui aura lieu à la Galerie du Génie de la Bastille du 6 au 18 septembre prochain. Évidemment, je vous en reparlerai.
J’écris ces quelques lignes en écoutant Myopia d’Agnès Obel. En alternant avec Blue Maqams et Souvenance de l’oudiste Anouar Brahem.
Savez-vous qu’un volcan islandais est peut-être une des causes de la Révolution Française ? L’éruption du Laki en 1783 produisit de gigantesques nuages volcaniques qui, empêchant le rayonnement solaire, provoquèrent hivers particulièrement froids, inondations catastrophiques et autres famines dévastatrices. Il est difficile de mesurer la relation de cause à effet de ces événements… mais juste d’en garder trace de mémoire en repensant aux conséquence qu’eut en 2010 l’éruption de Eyjafjallajökull… D’après vous, sur quel continent aura lieu la prochaine ? Faites vos jeux ou relisez Malcom Lowry !
J’ai poursuivi la lecture de Joseph Incarbona avec son roman en forme d’aire d’autoroute Derrière les panneaux il y a des hommes. Si je lis beaucoup, je relis peu. Tellement les rayons d’une librairie sont la plus belle image de l’éternité : tous ces livres que l’on ne pourra pas tous lire. Pourtant une amie m’avait donné l’été passé L’Œuvre au Noir de Marguerite Yourcenar, déjà lu il y a bien longtemps et bien oublié. Et ce fut délice de replonger dans le seizième siècle des aventures européennes de Zénon. Ce fut surtout grande jouissance que de mordre à nouveau dans cette belle langue de celle qui fut la première académicienne. Je vais relire les Mémoires d’Hadrien.
En cadeau de bougies, j’ai reçu Première Personne du Singulier, recueil de nouvelles d’Haruki Murakami qui vient de paraître. « Je « aime beaucoup.
Quand Haïti a proclamé son indépendance en 1804, la France a imposé en conséquence un tribut de 150 millions de francs-or pour compenser les anciens propriétaires d’esclaves de leur perte de propriété à la suite de la révolte de 1791. Le dernier versement de remboursement de cette dette a eu lieu … en 1957 !
« Pour qu’une chose soit intéressante, il faut la regarder longtemps » a dit Gustave Flaubert.
Dans les toiles du mois, une belle ribambelle de bons films : Ouistreham, Jane par Charlotte, Memory Box, Lynx, Twist à Bamako, La Place d’une Autre, Les Promesses, Une jeune fille qui va bien et pour finir cette série, le très sensible Les Jeunes Amants sur un scénario de la regrettée Solveig Anspach mis en scène par Carine Tardieu.
Si votre route passe par Villeneuve d’Ascq avant le 27 février, ne ratez pas la magnifique exposition ENTRE-MONDES consacrée à Paul Klee qui apporte belles réponses visuelles et plastiques à la question de la source originelle de l’art.
Là où les Lettres à Ailes lisent dans les Îles des Êtres
Neuve.
L’An Neuf est devenu L’An Neuve et cela n’a rien changé, puisqu’il faut que tout change pour que rien ne change. Car ce qui ne change pas est que tout change toujours. Alors puisse cette nouvelle série de Nouv’ailes dire le désir que le monde soit un peu plus féminin, juste accompagner ce mouvement de fond qui suscite encore bien des résistances mais n’en est pas moins inéluctable. Le poète l’avait mal traduit : c’est le féminin qui est l’avenir de l’humain. Que les vertus du Yin – souplesse, endurance, ténacité, tolérance, disponibilité, patience, accueil… – puissent émerger puissamment dans ce siècle déjà trop bouleversé.
Qu’espérer ? Rien sinon Croire au Doute.
Si je devais m’affubler d’une devise, ce serait celle-là. Mais je doute d’y croire entièrement. Alors j’affrme et signe depuis la solitude créative de mon atelier un optimisme volontariste et assumé : le monde ne va pas très bien, la pandémie perdure – va-t-on devoir passer à l’alphabet cyrillique?- le mur du climat se rapproche, les tibétains et ouïghours sont toujours torturés et exterminés, le Kazakhstan s’échauffe tandis que Hong-Kong s’éteint, mais un vaccin contre le paludisme commence à produire ses effets et un jeune député de 35 ans gagne l’élection présidentielle chilienne… Alors que viennent dans le domaine public tous les brevets de tous les vaccins !
Chercher le nouveau, explorer l’inattendu, fairer l’émergence, aspirer à la découverte, tisser le devenir et continuer incessamment à voir le monde à moitié plein en vidant quelques verres avides d’amitié. Et poursuivre ce que je sais faire de mon mieux. Faire ma part et créer quelques gouttes de beauté pour éteindre l’incendie du monde et étreindre avec volupté la poésie du faire.
C’est l’hiver, je fais le DO rond dans la douce chaleur de l’atelier et trame moult projets qui verront le jour, ou peut- être la nuit. Garder le doigt dans la libre spirale de la création. Entre deux projets, continuer la production de broches (il en reste de la production proposée le mois dernier) et accompagner la naissance des sculptures. Ainsi vient de naître ce MANGEUR DE CYCLOPES (image 2) très utile en période de pandémie d’écrans.
Au sens propre et au sens figuré… Le sens figuré serait-il sale ?
Beaucoup d’expositions vues dans la capitale : parfums russes dans celle d’Ilya Répine au Petit Palais (dépêchez-vous c’est jusqu’au 22 janvier) et celle de la Collection Morozov à la Fondation Vuitton (jusqu’au 22 février… 22, v’là l’année des 22… ). J’ai mis dans cette chronique (image 3) juste un détail de l’exposition d’Anselm Kiefer au Grand Palais Éphémère de Paris : les toiles gigantesques ne rentraient pas dans l’écran ! Très (trop?) impressionnantes. En ce 31 décembre 2021, le bonheur ébloui vint de Simone Pheulpin. Et dure encore (voir la première image de cet envoi).
Avant de lire le paragraphe suivant : Merci de vérifer que vous avez bien étreint votre portable !
Vu au cinéma dans cet entre deux ans : Le diable n’existe pas. Dur mais superbe flm. N’ergotons pas sur l’existence du Diable mais ce qui est sûr c’est qu’en Iran, la peine de mort existe ! La Panthère des Neiges. Vu deux fois, sur grand écran, yeux grands ouverts. Quelques tessons de foritures, mais les images de Vincent Munier et Marie Amiguet sont ab-so-lu-ment superbes. J’en profte pour vous redonner un lien pour une émission de la RTS Suisse que j’avais déjà citée dans les Nouv’ailes de Février 2020…
https://pages.rts.ch/emissions/passe-moi-les-jumelles/10731100-vincent-munier-eternel-emerveille.html? anchor=10846815#10846815 Ça fait à peine deux ans mais c’était dans le monde d’avant…
Maintenant nous sommes dans le monde d’après qui n’est hélas, pas le monde d’apprêt !
Dans les autres flms de ce début d’année, Madeleine Collins et En attendant Bojangles deux flms avec l’impeccable Virginie Effra. Belle, une version japonaise, fantastiquement animée et futuriste de la Belle et la Bête. J’ai oublié précédemment de vous recommander deux autres flms à tendance documentaire : Debout les femmes de François Ruffn et Gilles Perret et Marcher sur l’eau d’Aïssa Maïga.
Trente Pauline peuvent elles danser ensemble sur un trampoline ?
Il est encore temps de s’inscrire pour la primaire populaire, si cela peut vous aider à retrouver vos petits dans le marigot électoral qui s’annonce. Faites vos vœux pour que demain soit à portée de main! https://primairepopulaire.fr/
Dans les neuves lectures, la découverte de l’excellent Joseph Incardona, qui équationne La Soustraction des Possibles dans un roman aux bords des banques et du lac Léman. En rade à Brest, il y a La flle qu’on appelle et c’est Tanguy Viel qui l’a bien écrit. On ne sait pas vraiment comment est mort Antoine de Saint Exupéry. Michel Bussi enquête dans son roman « Code 612 Qui a tué Le Petit Prince ? » et tire des fls entre la disparition de l’auteur et celle de sa créature Le Petit Prince, qui demeure à ce jour le livre le plus traduit au monde après la Bible et le Coran !
Quant à Peter May, il a réapparu sur les rayons de ma médiathèque et m’a donné Rendez Vous à Gibraltar ! Ensuite je suis parti sur les pages d’Olivier Truc avec Le Cartographe des Indes Boréales. Ça se passe au XVIIème siècle, en Europe du Nord quand les protestants ont tenté et presque réussi à éradiquer la culture sami (lapone) et ses origines animistes et chamaniques pour exploiter les mines d’argent du grand nord scandinave. Ça parle aussi de chasse à la baleine. D’où cette question essentielle : pourquoi parle-t-on de baleines de soutien-gorge ? Y’a-t-il lien entre seins et cétacé ? Que nenni ! C’est tout simplement qu’à l’origine, les armatures des soutien-gorges étaient faites avec des fanons… de baleine !
L’aile d’eau du radeau part pour l’eldorado le 1 février prochain. C’est le Tigre d’Eau du Nouvel An Chinois qui l’a dit.
Il est encore possible de réitérer les vœux de Bon An. Que l’ennui ne soit pas l’An Nuit. Les jours s’allongent.
Première connexion à Internet. Ma mémoire de journaliste active l’idée d’un billet mensuel pour faire connaître et partager mon travail, mes humeurs et autres horizons culturels. Ce sera LE JOURNAL DU NEUF dont les 64 numéros courront jusqu’en février 2009. Puis, mutations obligent, il devient DES NOUV’AILES DU NEUF (Histoire d’ILS et d’ELLES aux pays des YEUX) jusqu’en juin 2015 où il emménage AU 9 RUE DES NOUV’AILES jusqu’à ce mois de décembre 2021 estampillé #64. La prochaine mutation du NEUF aura donc lieu en janvier 2022, de bonne augure puisque l’An aussi sera Neuf !
En attendant, l’atelier plein comme un œuf encore neuf continue sa moisson automnale sans trop se demander où iront toutes ses créations, se réjouissant du plaisir toujours renouvelé de jouer avec les formes, les couleurs et les matières. Comme en témoignent LE CHEVAL DE SATURNE et LA ROUE DE LAO qui courent et roulent entre ces lignes. En témoigne aussi ce NOËL À LA BROCHE, créations originales que je vous propose à la vente dans l’image 6 de cette chronique. Choisissez un numéro, envoyez un mail, un chèque ou un virement paypal et je vous adresse cet objet de peinture à épingler à votre boutonnière préférée.
Comme tous les ans, je participe à l’exposition LES MINIS DU GÉNIE à la Galerie du Génie de la Bastille du 14 au 26 décembre prochain. J’y exposerai quelques gravures et deux sculptures dont ŒUF DE VAGUES visible dans la première image de ces Nouv’ailes. Pour info http://www.legeniedelabastille.com/evenement/minis-2021-exposition-collective/ Je serai présent à la galerie les mardi 14 et mercredi 22 décembre de 14 à 17h ou bien sûr sur rendez vous si vous le souhaitez. Et au vernissage le jeudi 16 à 18h.
Si vous passez par le Musée du Quai Branly dimanche 12 décembre entre 15 et 17h, j’y serai pour participer à une démonstration en plein air de Kyudo, le tir à l’arc traditionnel japonais.
« NON À L’ENVIRONNEMENT !» Ceci n’est pas une provocation, mais une remise en place de ce mot désormais à la une de toutes les campagnes et qu’il faut cesser d’employer… Car qui dit environnement se place au centre et considère seulement ce qu’il y a autour, ce qui l’environne. Or en cette époque de déprime climatique, animale, voire apocalyptique, il est de plus en plus sûr que l’humain n’est pas, n’est plus le centre mais un élément parmi d’autres de ce grand éco-système qu’il est plus juste d’appeler tout simplement le vivant. Dans les nombreux appels à projets auxquels je réponds, je ne parle jamais d’environnement ou d’écologie bien que toute ma pratique artistique en soit profondément nourrie. J’aime cadrer mon travail dans une poétique du vivant, dans l’éloge et la défense du fragile et de la beauté du monde. Histoire d’oublier les 531 milliards de dollars des ventes d’armes en 2020, en augmentation de 1,3% (17% depuis 2015 !) alors que l’économie a reculé de 3,1%. Grrrrrr !!!
En cette période de l’année où la nuit attend que les jours commencent à rallonger, entendu hier matin à la radio cette phrase du danseur de flamenco Israël Galvan citée par le poète André Velter : « L’énergie qui viendra un jour à me manquer, je la dépense ». Je l’ai méditée tout le jour et même la nuit en massant avec arnica et gaulthérie la douleur tendineuse de mon genou gauche.
J’entends parler de la cinquième vague et j’ai soudain l’impression d’avoir raté la quatrième… Avez vous remarqué comment le temps semble parfois distordu par ces ondes de pandémie ? Êtes vous sûr que cet événement a eu lieu cette année ou bien l’an passé ? En ces temps où l’on peut avoir peur qu’il n’y ait pas assez de lettres dans l’alphabet grec, je repense aux prévisions de l’astrologue André Barbault dont j’avais illustré le livre en 1998 et que j’avais évoquées en avril 2020 dans les Nouv’ailes #48 : crise de 2010, chute de 2020 (en lien avec la Chine) et envol en 2026… Il semble bien qu’il va falloir être patient, c’est d’ailleurs comme cela que l’on est nommé, dans la salle d’attente du médecin…
La Suède vient de lancer une commission vérité sur les persécutions subies par les peuples autochtones du Grand Nord que l’on appelle à tort Lapons et qui eux, se nomment Samis. L’actualité rejoint la littérature puisque cette enquête est le motif de La Montagne Rouge, roman d’Olivier Truc que je viens de lire et dont j’avais beaucoup aimé Le Dernier Lapon. Dans les autres réjouissances lues ce mois, Faillir être flingué de Cécile Minard, une géniale chevauchée littéraire en forme de western et La Désobéissance de Naomi Alderman. Une amie m’avait conseillé Le Pouvoir de cette même auteure, mais comme je ne l’ai pas trouvé dans les rayons de ma médiathèque, j’ai emprunté son premier roman, l’histoire d’une analyste financière new-yorkaise qui revient à Londres dans son milieu d’origine juif orthodoxe après le décès de son rabbin de père. De quoi se réjouir d’être agnostique !
Dans les films regardés cet automne, les toniques et emballantes Olympiades de Jacques Audiard, le formidable Benoît Magimel dans De son vivant d’Emmanuelle Bercot. Comme l’est aussi Anamaria Vartolomei dans L’Evénement d’Audrey Diwan d’après un livre d’Annie Ernaux. Et aussi Madres Parallelas d’Almodovar.
Fêtes vous bien vivant. Chaque matin, le Monde est Neuf et l’Aube est l’anagramme de Beau.
« La peau des tableaux de mon automne berce mon cœur d’une ardeur qui frissonne ».
Les longues journées de l’atelier d’octobre fourmillent de mille pinceaux… Beaucoup de travaux commencés d’ici de là au fil de ces deux récentes années trouvent lentement le chemin vers leur lumière… Sans hâte, dans une liberté sans urgence et en confiance… Au premier chef, la belle commande qui a fait naître « Le Soleil a rendez-vous avec la Lune sous les ailes de Saturne », un triptyque de bois et de toile qui a régalé les papilles de mes pupilles. Puis, pour le fun et les cadeaux des saisons qui viennent, des broches de placages de bois peints pour accrocher un clin de beauté aux cols colorés de vos manteaux amoureux. Et aussi, tout un chapelet de petites sculptures comme autant de plaisirs à partager la création… Vous trouverez trace de tout cela dans les images jointes comme les mains d’une prière animiste.
Mieux vaut un bouquet mystère qu’un bouc émissaire !
En septembre, je me suis inscris à la primaire écologiste… Je ne sais si cela aura grande importance pour les émois à venir mais c’était bien plaisir pour une fois de mettre un bulletin dans l’urne des « Pour » plutôt que de voter par défaut dans l’antre des « Contre »…
J’aime bien parfois réagir avec un peu de recul le long du torrent de l’actualité : mesurer avec effroi et distance les ravages enfin révélés par la commission CIASE (Commission Indépendante sur les Abus Sexuels dans l’Église, rien que le nom fait froid dans le dos des enfants de chœur). Vertige et terreur devant l’avalanche des témoignages ! Au moment où j’écris ces lignes, je reçois l’article de Libé où huit femmes – dont sept à visage découvert – témoignent des viols et agressions sexuelles commises par Patrick Poivre d’Arvor, pratiques qui étaient fort bien connues de la hiérarchie de TF1. Raté pour le recul, j’enrage devant mon écran et je vous espère de même devant le votre ! Mais les écrans ont-ils un devant et un derrière ?
Il serait temps que les mâles passent du coq à l’âme et abandonnent définitivement la formule Hun.
J’ai décidé de changer de fournisseur d’électricité. Après avoir fui EDF, cet état dans l’Etat qui nous a enferré depuis plusieurs décennies dans les affres du nucléaire – qui se souvient encore de Vital Michalon? – puis Engie et Iberdrola, je viens pour quelques euros mensuels de plus de m’abonner à Enercoop. Le mail que vous êtres en train de lire est désormais alimenté en énergie non nucléaire et renouvelable. Pour toute info: https://www.enercoop.fr
Le logiciel Scribe qui devait faciliter le dépôt des plaintes a été recalé après quatre ans de recherches et quelques 12 millions d’euros… Dites à toutes les agressées qu’elles pourront continuer à porter des peaux de plaintes….
Mais dans quel monde Vuitton ?
Dans la première partie des années 90, j’ai participé aux prémisses de ce qui allait devenir le gros bouquin rouge du Yi Jing publié en 2002 par les Éditions Albin Michel. Évincé par le léonin initiateur de ce projet, j’en conçu quelques désappointements qui ne m’empêchèrent pas de continuer à écouter ce guide de sagesse et cet habile conseiller qui est aussi le fondement de toute ma pratique et poétique artistique. L’art comme une tentative de re-création du monde, la poésie comme un élan pour créer des grains de beauté sur la peau du Ciel. Pierre Faure, l’autre auteur de ce gros livre rouge a persévéré dans l’exploration des 384 lignes des 64 figures du Livre du Yi. Son authentique travail de nourrissage, d’approfondissement de cette pensée de la mutation du moi et du monde vient de voir la voie de cette parole éclore sous la forme d’un beau livre paru aux éditions Les Belles Lettres. Moi qui ai partagé un temps cette recherche collective, fus tout ému à la vision de ce livre bleu édité dans la collection La Compagnie du Livre Rouge. Je gage que cette édition va devenir référence et à terme estomper le rouge d’Albin et le jaune de Richard Wilhelm, celui par qui j’ai rencontré le Yi dans les années 70. Au premier toucher, j’ai aimé la matière de l’objet, la texture de sa couverture tissée, la rigueur de sa mise en page et le plaisir de vous en partager l’image.
Dans la Boite Noire éclairée par Pierre Niney, mettez toutes les Illusions Perdues d’Eugénie Grandet et les douze chapitres norvégiens de Julie. Ajoutez une Première Vache -First Cow- et Pig, une truie chasseuse de truffes et compagne disparue de (Nicholas) Cage. Un Albatros à Régnier et un bon morceau de Barbaque drôle et gore à la foie et à la marinade Foïs, essayez de réduire La Fracture et portez le tout dans le Compartiment 6, vous avez ainsi obtenu mon cocktail cinématographique du mois !
Après la longue traque des Furtifs d’Alain Damasio, j’ai changé ma gamme de lecture et embarqué avec ravissement dans Anima de Wajdi Mouawad. Une traque policière entre USA et Canada qui prend racine dans le massacre de Sabra et Chatila. L’époustouflante originalité de ce roman tient à son point de vue : l’histoire est contée depuis la vision qu’en ont les animaux qui en témoignent ! Qui un moustique qui pique le cou du héros, qui un chien qui décrit les sensations de son maître, une araignée qui tisse son regard sur la scène du crime ou une ratte qui meure dans la gueule du chat de la victime ! Puissant !
Cela reste un mystère pour ma mémoire : je n’ai aucun souvenir de la mort de Georges Brassens survenue le 22 octobre 1981, quelques jours après retour de mon premier séjour au Québec. Un effet du décalage horaire de la Belle Province ? Ce qui ne m’a pas empêché de me réjouir de toutes les manifestations qui ont fêté le centenaire d’Oncle Georges qui chantait si bien le 22 septembre où « c’est triste de n’être plus triste sans vous » et « qu’emmerdait la messe sans le latin ». Le lendemain, je m’en fus écouter Francis Cabrel à la Seine Musicale de Boulogne Billancourt et ce fut un délicieux moment de chants, de sons et de chansons.
Les mots de la musique contre les maux du monde. L’automne en tonne. Et le silence s’en étonne.
« Chut ! » dit la peau des feuilles dans l’erre du temps.
« Le numérique se duplique, la matière est unique. »
Tel pourrait être le résumé le plus condensé des 688 pages du livre d’Alain Damasio, – Les Furtifs – qui m’accompagne depuis plus de trois semaines et dont je vais terminer les dernières lignes juste après la rédaction de ces Nouv’ailes. Un univers de fiction qui prend racine et se nourrit de notre monde en pleine numérisation. « La réalité ultime, la réul, je la vois comme le produit ultime du capitalisme : vendre de la réalité ». Lecture exigeante et passionnante d’une dystopie à la forme et à l’écriture originale et foisonnante. Parfaite pour le prochain confinement… ? Mais non, je blague…
L’avenir est tout vert ou l’avenir est ouvert ?
Le grand Eddy chante à la radio « où sont mes racines ? » J’hésite entre La Douceur Angevine ou La Voie Lactée. Sans doute un peu des deux.
Septembre prit la Twingo d’une longue route amicale et buissonnière pour me faire revenir d’Andorre avec le beau catalogue de la Biennale de Land Art dont je vous livre quelques feuilles dans cette missive d’automne. J’aime ces fragments de vie nomade qui roulent de ville en ville, qui conjuguent l’amitié et la durée, la mémoire et l’instant, la joie d’un rire et un verre de Menetou Salon. Au hasard pérégrinant, il y eut le beau film Le Sommet des Dieux dont j’avais déjà adoré la BD.
Au retour dans l’atelier la première sortie fut un éblouissement : à la place de l’étoile surgit dans la nuit l’immense et magique Arc de Triomphe emballé par Christo & Jeanne Claude. Un triomphe de l’Art. Chapeau bas, artiste magicien, je ne peux me résoudre à ne mettre qu’une photo en accompagnement de ces Nouv’ailes. Va pour une belle série avec en bonus le déshabillage monumental. L’événement ne dura hélas qu’une petite quinzaine. Pour ma part, je l’aurai volontiers laissé ainsi, pour l’hiver… et même pour l’éternité.
Une partie des toiles et objets de peinture couvés à l’atelier pendant les confinements voie venir son achèvement. Instant délicieux où la décantation picturale vient se nicher dans les petits détails de finitions qui sont signes de terme et d’accompli. Ainsi sont nées ces Horloges Sans Temps qui ouvrent les images de ces Nouv’ailes.
« L’immobile se disperse, le mobile demeure. Les hommes n’ont pas besoin de croyance, ils ont besoins de connaissance. Et aussi de connaissances des croyances. » Quel bonheur de réentendre dans le poste ces belles paroles de Jean Claude Carrière.
On a beaucoup célébré la mission Apollo 11 qui a porté le premier humain sur la Lune en Juillet 1969. Mais on a un peu oublié Apollo 8 dont les astronautes, à la veille de Noël 1968, ont pris la première photo d’un clair de Terre. Ne serait-ce point là, à l’aulne de ce premier regard sur notre petite planète bleue, le première signe d’une conscience écologique qui tarde encore à envahir l’espace ? Entre Apollo 8 et 11 il y eut en mars et en mai 69, Apollo 9 et 10. C’est dire l’avidité américaine pour remporter ce challenge lunaire. Heureusement, quand les hommes sont partis à la conquête de l’espace, les femmes ont fait un Mouvement.
Au cours actuel de la monnaie, la dette imposée à Haïti par la France au début du XIXème siècle s’élèverait à 30 milliards d’euros… Un tremblement de taire !
Dans mes lectures septembrionales, il y eut aussi Le Dernier Lapon, d’Olivier Truc et les poèmes d’Enfin le Royaume de François Cheng.
Au pied des écrans, je suis monté avec grand plaisir voir Dune de Denis Villeneuve au cinéma Max Linder sur les grands boulevards parisiens. Grand écran, grand son, grand spectacle. Plus intime, j’ai aimé Petite Sœur de Véronique Reymond et Stéphanie Chuat, Cigare au miel de Kamir Aïnouz avec la prometteuse Zoé Adjani, nièce de. Tout s’est bien passé, de François Ozon avec l’impeccable Dussolier et Sophie Marceau. La bande annonce de L’Origine du Monde de Laurent Lafitte m’avait bien titillé. Mais d’Origine, j’en suis resté sur ma faim. Et me suis consolé avec l’oxymore improbable de Gaza mon Amour.
Pour rappel, Amazonia, l’exposition des photos de Sebastiao Salgado à la Philarmonique de Paris dure jusqu’au 31 octobre.
« Terrien, t’es rien ! ». Mais un petit Rien du Tout, c’est déjà beaucoup, c’est même plus que trois fois rien. Il suffit juste de trouve sa place sous les étoiles, dans le beau lait de la Voie. Christo a trouvé la sienne à jamais, place de l’Étoile. Merci !
« On peut changer sa vision du monde avec un léger fléchissement des genoux » a dit l’immense Cartier-Bresson, dont j’ai pu voir l’exposition, aujourd’hui close, Le Grand Jeu à la BNF. Il vous reste celle qui est ouverte jusqu’au 31 octobre au Musée Carnavalet de Paris, entièrement réaménagé. Quand je regarde les vues de ce géant de la photographie, j’ai la sensation physique de percevoir l’ordre caché du monde. Comme si derrière l’apparent chaos du réel, les compositions parfaites de ses instants décisifs dessinaient la géométrie souterraine de l’architecture de la vie. 31 octobre, c’est aussi la date de clôture de Amazônia, superbe exposition de photos de Sébastiao Salgado à la Philharmonique de Paris dont est extraite la cinquième image de ces Nouv’ailes. Pas d’autre commentaire que l’impératif « allez-y ».
Tous ces points de vue nous renvoient à notre regard sur le monde comme il va, nous rappellent qu’il ne faut jamais oublier d’où l’on parle, comme se souvenir d’où est placée la caméra dont est issue l’image, l’œil ou la bouche d’où sortent le film ou la parole… Il en va de l’alimentation du regard dans cette réalité phagocytée par le marché de l’attention. Plus qu’un pas de côté, c’est à un regard de côté qu’il faut s’atteler… N’est-ce point là le lieu de la peinture ?
Après le lit de plumes sous le parasol d’œufs à Andorre et le Porc Épique sur les hauteurs savoyardes, l’été s’est mis en pente provençale puis a redécouvert les charmes aoûtiens de Paris déserté. Septembre prolonge l’été et m’emmène de nouveau vers les rivages andorrans pour la récupération des œufs et des plumes et la récolte de leurs effluves de poésie dans les chemins de retour buissonniers et amicaux…
L’expression « Dans le temps » est souvent utilisée pour qualifier le passé. Mais où est-on quand on est « dans le temps » ?
L’été fut lectures. Ce temps de solitude intime qui relie à la multitudes des univers. Aux temps incertains où s’avance l’intelligence artificielle (quelle étrange définition! N’oublions pas que intelligence vient de inter-ligere, lire entre les lignes) n’est-ce point là la seule et véritable machine à voyager dans le temps ?
Dans les lignes de mes itinéraires estivaux, Il y a :
Les Roses Fauves de Carole Martinez. Il faut lire cette auteure (Le cœur cousu, La terre qui penche, Du domaine des murmures) qui dans ce roman jongle avec les fleurs, les cœurs, la Bretagne, le temps et sa propre réalité. Des pétales de voyages…
La Serpe de Philippe Jaenada. Un formidable enquête sur un triple assassinat perpétré dans le Château d’Escoire en Périgord. Le château était clos, la quatrième personne à l’intérieur, Henri Girard, était coupable, forcément coupable mais fut acquitté et disparut en Amérique du Sud. Au retour, il publiera sous le nom de Georges Arnaud un livre qui inspirera le film éponyme : Le Salaire de la Peur. Le récit que fait Jaenada de son enquête plus de 70 ans après les faits est absolument passionnant. Il est d’ailleurs dans l’actualité de la rentrée puisque il vient de publier une nouvelle enquête littéraire – Au printemps des monstres – sur Lucien Léger, « l’étrangleur » qui a passé 41 ans en prison.
Danser les ombres de Laurent Gaudé. Des personnages entrelacés dans les rues de Port-au-Prince à Haiti entre le passé et l’instant, les ombres et les vivants, les corps et les âmes. Une partie de ce roman se passe pendant le tremblement de terre de 2010. L’ironie tragique mais empathique de cet été fut que cette lecture eut lieu juste après celui du 14 août…
La Proie de Deon Meyer. J’aime cet auteur sud-africain dont les romans, policiers mais pas que, parlent si fortement de ce continent austral. En ces temps de (post?) pandémie, lisez aussi L’Année du Lion.
Pour l’élégance de sa pensée, trempez vos neurones et votre sensibilité dans la puissance de Œil Ouvert et Cœur Battant de François Cheng. Son sous-titre : « comment envisager et dévisager la beauté ». Indispensable pour la santé du regard.
Rajouter quelques pincées d’Éclats de sel de Sylvie Germain pour une balade dans le temps et l’histoire de Prague.
Une découverte : Le dernier frère de Nathacha Appanah. Je ne savais pas que des juifs refoulés de Palestine avaient été déportés en 1940 à l’Île Maurice et cela est en filigrane du récit d’un adolescent au bord de la forêt mauricienne. Un bel et bien construit exercice sensible.
Et pour clore ce dédale de pages, une merveille de pépite atroce et sensuelle : La Giocanda de Nikos Kokantzis aux Éditions de l’Aube. Une histoire d’amour adolescente achevée dans les flammes d’Auschwitz que l’auteur, dont c’est le seul livre, a mis trente ans à offrir à la grâce du monde. Il fallait bien trente ans de silence pour tisser les mots de ce premier amour qui est aussi un amour premier.
Quelle est l’indécence de l’un des sens ?
En supplément de lecture, il y eut aussi la relecture d’une nouvelle de Haruki Murakami tirée de son recueil Des Hommes Sans Femmes, intitulée Drive My Car. Qui a donné son titre au film éponyme qui a reçu le grand prix du scénario à Cannes. Une merveille de film que j’ai vue deux fois tellement c’est fort, émouvant et puissant. Dans la bande annonce de mon été, il y eut aussi Annette, Benedetta, Les Voleurs de Chevaux, Nomadland, Bergman’s Island, La Loi de Téhéran, Une Histoire d’Amour et de Désir et Un triomphe, film de prison très « beckettien » inspiré par une histoire réelle en Suède en 1986. À l’insolite dénouement concluant cette histoire et ce film, le grand Samuel déclara : « c’est la meilleure chose qui pouvait arriver à ma pièce ». La pièce, c’était « en attendant Godot » !
Dans certaines cultures, le passé est figuré devant soi (on peut le contempler) tandis que le futur est derrière (on ne peut le voir). Et vous, en cette soirée d’avant automne où l’orage s’apprête à arroser la verrière de l’atelier, quel Godot attendez-vous ? Le normal ou l’anormal ? La norme ou l’énorme ? Nous n’avons point de vues sur ce qui s’en vient, telle est la leçon de ce temps que l’on nomme présent. Puisse-t-il aussi être cadeau !
Je sors du film Délicieux, qui conte joliment la naissance du premier restaurant (dont le mot français est aujourd’hui universellement employé) à la veille de la Révolution. Un délicieux présent…
Telle fut ma réponse à la question posée par la quatrième édition de la Biennale de Land Art d’Andorre « Que feriez vous si vous deviez être confinés en montagne? »
Il fallut donc vider les 192 œufs blancs et 192 œufs roux, trier les 384 plumes blanches et jaunes selon qu’elles soient dextres ou senestres, fabriquer et peindre le châlis du lit, percer les 16 lattes de plexiglas de 24 trous pour y insérer les plumes, concevoir et faire le disque bleu supportant les 16 baleines du parasol, mettre tout cela dans la Twingo et prendre la route vers Andorre pour y installer ce caressant lit de plumes sous un aérien parasol d’œufs…
Cette installation fait partie de la cinquantaine d’œuvres visibles jusqu’au 15 septembre aux alentours du Lac d’Engolasters, entre les communes d’Escaldes-Engordany et Encamp, près d’Andorre la Vieille. https://visitandorra.com/fr/agenda/andorra-l-andart/