QUOI DE NEUVE ? (10)

11 décembre 2022 § 0 commentaire § permalink

J’aurais voulu écrire des mots roses mais ceux de l’automne sont plutôt moroses. Le plomb de la guerre en Ukraine pèse depuis neuf mois et un psycho-tsar de foi mauvaise poursuit son insatiable et mortifère désir d’anéantir et sa folie meurtrière. Indicible écœurement. Impuissante colère. Alors pour la taire, je vous partage quelques fils de quotidiens tissés aux brumes de novembre.

Jeudi 10 novembre : La marée républicaine américaine n’est pas trop forte, les russes quittent Kherson et il y 600 lobbystes des énergies fossiles à la COP 27. Scandaleux. Comme chaque mois, quelques échos de ma chronique viennent embellir ma boite mail. Réjouissant.

Vendredi 11 : Marine, petite nièce dont je parlais dans la première série du Journal du Neuf est majeure aujourd’hui. C’était en 2004. Nous avons un demi-siècle d’écart et ça ne me rajeunit pas !!!

Je vais porter à la Galerie du Génie les cinq photos que je vais y exposer dans le cadre du Mois de la Photo.

Henri Anglade, deuxième du tour de France cycliste en 1959 est décédé ce jour à 89 ans. Son nom feure bon la mémoire d’enfance.

Je vais acheter du thé. Je porte encore à la boutonnière de mon manteau d’hiver les rubans jaune et bleu épinglés au printemps dernier lors de la manif pour l’Ukraine. À la caisse de la boutique, une jeune femme blonde m’interroge en anglais « it’s for Ukraine ? » J’acquiesce, elle me sourit et me remercie.

Samedi 12 : Après la séance dense et concentrée de kyudo hebdomadaire, je vais voir Pacifiction d’Albert Serra avec Benoît Magimel, (un peu trop) longue dérive dans l’univers pas si pacifique de Tahiti. Puis je fle au théâtre, invité par mon amie Marie qui empêchée, me donne sa place. C’est Une histoire d’amour d’Alexandre Michalik et moi qui vois beaucoup de films, me régale de voir le jeu des comédiens « en vrai » comme on disait quand j’étais petit.

Dimanche 13 : Jour de Taikai. C’est le mot japonais pour dire tournoi. C’est un jour sans. Une flèche dans la cible sur 20. La pratique d’hier me semble loin. Je reviens légèrement down de cette pratique sisyphienne. Demain sera une autre flèche.

Lundi 14 : Je dévore La Face Nord du Cœur de Dolores Redondo, enquête policière qui se passe à la Nouvelle Orléans pendant l’ouragan Katrina. Et vais voir Armageddon Time de James Gray, chronique autobiographie de son enfance new-yorkaise. J’envoie un projet – Le Miroir aux Baleines – pour un parcours artistique Les Arts au Clair de Lune dans la ville de Dinard, sur le thème « Animal ».

Mardi 15 : Je découvre dans mon petit magasin bio qui s’appelle Le Champ des Rêves une variété de pommes qui s’appelle Pattes de Loup. Variété ancienne, délicieuse, originaire de mon pays d’Anjou ! Je garde l’expo du Mois de la Photo à la galerie du Génie. Puis je file à un cours de dessin de modèle vivant, essayant sans cesse de mettre la ligne d’un corps dans les deux dimensions d’une feuille de papier. Jamais acquis, toujours en recherche… Passionnant !

Mercredi 16 : Travaillé sur un projet pour Horizon-Sancy, festival de land-art dans la région du Puy de Sancy. Il pleut. Je vais voir et aime Les Amandiers de Valeria Bruni-Tedeschi qui sort aujourd’hui.

Jeudi 17 : Je reste au chaud dans l’atelier face au rhume qui s’approche. En soirée, c’est vernissage de l’expo du Mois de la Photo à la galerie du Génie. Après la rencontre avec les artistes exposants, je vais voir La Maison, flm d’Anissa Bonnefont d’après le roman d’Emma Becker. La vie d’une prostituée vue de l’intérieur d’un bordel de Berlin d’après une expérience vécue par l’autrice.

Vendredi 18 : Je vais me faire dévitaliser une dent. 472€ ! Puis je vais voir Couleurs d’incendies d’après le deuxième tome de la trilogie de Pierre Lemaitre. Pas du grand cinéma, mais un bon moment. Comme une grande BD efficace qui me réjouit. La toile des écrans ouvre des fenêtres d’évasion dans le gris froid de novembre.

Samedi 19 : Concert de Hadouk Duo au Triton, avec Didier Malherbe et Loy Ehrlich. Moment suspendu, hors du temps, magie pure de la matérialité de la musique dans la communion et le silence d’une écoute partagée. Qui me fait revivre l’intense émotion d’avoir eu Didier au finissage de mon exposition de septembre. Merci et gratitude.

Dimanche 20 : Magnifique flm que « Plus que jamais » de Emily Atef avec Vicky Krieps et Gaspard Ulliel. Film sur la fin de vie d’une jeune femme atteinte d’une maladie incurable dans lequel la présence de Gaspard Ulliel, disparu en janvier dernier, trouble et amplifie le motif et les émotions du flm. Profond !

Lundi 21 : Belle expo Préhistoire au Musée de l’Homme conjointe à celle des photos de Lekha Sinh « Les femmes portent le monde ».

Mardi 22 : Walter Sickert au Petit Palais. Découverte de ce peintre anglais (1860-1942) quasi inconnu en France. À la palette un peu trop terne à mon goût. Puis Ariaferma. Somptueux film italien de Leonardo di Costanzo. Film de prison très original et d’une densité de jeu intense et remarquable. Avec Toni Servillo et Silvio Orlando. J’ai voté pour lui pour le palmarès du flm étranger de l’émission Le Masque et la Plume.

Jeudi 24 : Neuf mois de guerre en Ukraine. Un océan de minutes de silence et de compassion ne suffirait pas…

Vendredi 25 : J’ai vu cet été quelques-unes des installations de L’Art dans les Chapelles, dans la région de Pontivy. Je souhaite postuler en envoyant au directeur artistique, par wetransfer, un pdf avec CV, démarche artistique et une cinquantaine d’images de mes installations. Le dossier est téléchargé à 7h32 et je reçois un mail daté de 7h34 disant que «je vous remercie (…) mais votre travail ne correspond pas à l’orientation que je souhaite donner à notre manifestation». Dégouté, je ne peux que répondre en félicitant cet éminent directoire artistique pour la célérité de son regard et de sa réponse !

Christian Bobin s’en est allé. Mon ami artiste Patrick Demazeau dit « Made » aussi. Une triste croix de plus dans l’agenda amical. Mais pour se souvenir https://fr.calameo.com/accounts/626557

Samedi 26 : Week-end de Coupe de France de Kyudo à Eaubonne dans le Val d’Oise. Aux plaisirs de la douce compétition des flèches s’ajoute celui de retrouver les amis kyûdôjins.

Dimanche 27 : Un bel arc-en-ciel troue le gris du matin et me souhaite une bonne journée. Mon club – Kyudo Art & Pratique – termine troisième du tournoi par équipe.

Lundi 28 : Après un long travail de dessin et de rédaction, j’envoie mon dossier pour Horizon-Sancy. Il s’appelle Cratère-Lumières. C’est ma treizième candidature en quinze ans. Vu l’impressionnant Saint Omer d’Alice Diop.

Mercredi 30 : J’envoie ma candidature pour une résidence de deux semaines en avril prochain dans le désert du Karoo en Afrique du Sud. Mon intention se conjugue en trois mots : Pierre, Œuf, Plume. Une version land-art de Shi Fu Mi ? Je file voir Annie Colère, avec Laure Calamy pour me plonger dans les débuts du MLAC à l’orée des années 70. Salutaire.

Jeudi 1 Décembre : Je finis le roman La Volonté de Marc Dugain. Roman sur la vie de son père écrit pendant le confinement. Roman ? « La plus belle des fictions est celle qu’on entretient sur ses proches dans des souvenirs qui jalonnent une mémoire flottante. » dit l’auteur. Grand plaisir à cette lecture du lien entre père et fils. Je vois She Said, le flm sur les deux femmes journalistes du New-York Times qui ont fait tomber Harvey Weinstein. Impeccable.

Vendredi 2 : Belle exposition au Musée Cernushi : L’Encre en mouvement, une histoire de la peinture chinoise au XXème siècle. J’avais adoré Incroyable mais vrai de Quentin Dupieux mais suis resté à l’écart de Fumer fait tousser.

Samedi 3 : Je commence Le Grand Monde, nouvel opus de Pierre Lemaître, à l’écriture fluide et efficace qui prolonge Au-revoir là-haut dans la France, le Liban et le Vietnam de l’après deuxième guerre mondiale.

Dimanche 4 : Je renoue doucement avec l’activité peinture dans l’atelier en préparant de nouveaux supports à base de papiers de soie collés et de sables colorés comme celui de l’image n°1 jointe. Histoire de juguler les nœuds de doute et de réchauffer le froid des pinceaux.

Lundi 5 : J’envoie une « Arche-Miroir » pour un projet de sculpture dans un parc de la ville du Puy en Velay.

Mardi 6: Là où les choucas nichent, y a t-il des choux-caniches ?


Mercredi 7: Je sélectionne les photos qui accompagnent cette nouv’aile…
Jeudi 8 : … que j’écris entre deux touches d’aquarelle.

Merci d’avoir marché jusqu’au bout sur le fil de cette chronique. Je vous souhaite la paix d’un solstice de neige et le feu de joie d’un flocon de bois.

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QUOI DE NEUVE? (9)

10 novembre 2022 § 0 commentaire § permalink

Meadows, you know ?

C’est le nom d’un homme, Dennis Meadows, co-auteur d’un rapport commandé par le Club de Rome en 1972 intitulé The Limits to Growth (Les limites de la croissance) qui simulait par ordinateur les conséquences de la croissance économique et de nos systèmes humains, techniques, économiques sur le Système-Terre. Ce texte préconisait alors sur le plan démographique la limitation à deux enfants par couple et sur le plan économique la taxation de l’industrie pour lutter contre la pollution…Tout était dit dans ce Rapport Meadows qui refait surface dans le flot de l’actualité, 50 ans plus tard… Mais tout fut tu et foutu avec l’arrivée de Thatcher et Reagan ! Combien sommes-nous à avoir eu raison d’avoir raison trop tôt ? Synchrone, ce rapport émerge à la page 106 de l’émouvant livre de Camille de Toledo Thésée, sa vie nouvelle, quête sensible d’identité familiale qui contraint à rouvrir les fenêtres du temps…

Lire. Lire. Lire. Remède au dé-lire de l’époque. Bouclier contre ce monde d’écrans à cran, asphyxié par les effluves mortifères du gaz russe et les actualités ombrageuses qui mettent à nu et questionnent la fragilité de nos mondes et les énergies de nos modes de vie. Lire pour prendre la hauteur des auteurs, pour ne pas penser l’irréparable. Comment faire pour supporter l’insupportable ?

«Que la force me soit donné de supporter ce qui ne peut être changé et le courage de changer ce qui peut l’être mais aussi la sagesse de distinguer l’un de l’autre.» (Marc Aurèle).

Alors dans les pages d’octobre, quelques autres feuilles de lecture :

David Diop, La Porte du Voyage Sans Retour. Belle langue et beau récit testamentaire d’un naturaliste du 18ème siècle qui tombe en amour avec une jeune femme promise à l’esclavage.

James A. McLaughlin Dans la Gueule de l’Ours. Un gardien d’une forêt de Virginie recherché par les cartels mexicains aux prises avec des chasseurs d’ours…

Donna Leon, Mort à la Fenice. Qu’il est bon de temps en temps de se (re)laisser bercer par la plume vénitienne du commissaire Brunetti.

Peter May, Quarantaine. Peter May a écrit ce roman épidémique et prémonitoire en 2005, opportunément publié en 2020 pour cause de vous savez quoi !

Pas vraiment accroché à la langue d’Alain Mabanckou dans Petit Piment, mais essaierai d’autres ouvrages de cet auteur. Si j’ai bien aimé jadis les aventures policières de Camilla Läckberg, j’ai détesté ce court texte Sans passer par la case départ, plat comme un reliquat d’impôt à payer et sans aucune envergure.

Écouté avec plaisir la série d’émissions de La Terre au Carré « À la recherche des Origines ». Qui n’existent pas car alors qu’y aurait-il avant l’Origine. Question-Vertige du Temps… qui se perd dans la Nuit des Temps… et dans les spirales de mes tableaux !

https://www.radiofrance.fr/franceinter/grille-programmes?date=31-10-2022

Je participe à une exposition collective dans le cadre du Mois de la Photo à la Galerie du Génie de la Bastille avec quatre photos noir et blanc (dont l’image n°5 de cette chronique) et une photo couleur. Le vernissage est le jeudi 17 novembre à 18h. J’y serai de permanence le mardi 15 et vendredi 25 novembre de 14 à 17h. Pour toute info :

Dans les films du mois : Un beau matin, L’innocent, La Conspiration du Caire et un premier flm ukrainien d’avant la guerre, fort, brut et puissant : Le serment de Pamfir.

Moi qui n’ai pas d’enfant, je suis toujours ému quand se tisse une relation d’amitié avec les enfants d’amis. Belle émotion aussi quand cela se passe avec les parents d’amis. J’aime ces amitiés qui font fi de l’âge. Je dédie cette chronique à la mémoire de Monick, maman de Nathaly, Stanislas et Cécile. Et à cette jeune femme inconnue qui a présidé à la cérémonie de crémation avec humanité, sensibilité et douce empathie. Ce qui n’est hélas pas toujours de cas, me confiait une amie comédienne qui anime des sessions de formation auprès des personnels funéraires.

Je dédie aussi cette missive automnale à Michel C., amoureux des belles lettres et complice d’arc dont la corde a lâché pour tourner la page de l’au-delà des cibles.

J’écris ces lignes dans un silence d’automne, relié à votre écran par quelques minutes de lecture et d’images qui viennent de fêter leurs 20ans : les premières colonnes du Journal du Neuf prirent leur envol en octobre 2002.

Puisse cette durée donner encore complicité à ce temps de partage. Et vous remercier jusqu’au bout de cette ligne.

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QUOI DE NEUVE? (8)

28 octobre 2022 § 0 commentaire § permalink

Dans l’Entre & la Roue, il y eut le plein et le vide.

Le plein ce sont les 250 personnes qui sont venues donner regard aux couleurs, matières et formes de mon exposition à la Galerie du Génie. (voir l’image 1 jointe). Quels bonheurs pendant ces deux semaines de voir mes créations ailleurs que dans le fouillis trop plein de l’atelier, sur des murs blancs d’espace où l’énergie de la couleur qui rime avec chaleur attire le passant de la rue de Charonne et quelques yeux amis qui me suivent depuis longtemps…

Le vide, ce fut comme un voile de doutes sur le devenir de cette expérience, sur la rareté des ventes – deux dessins, (image 2) + une petite sculpture – me permettant tout juste d’amortir les frais d’exposition. Puis les tableaux ont retrouvé le sommeil de l’atelier comme plein de leurs camarades qui n’ont été exposés qu’une ou deux fois. Dans le même temps l’Arbre à Miroirs fut démonté et les 432 miroirs or & argent montés sur treillis à béton ont eux aussi regagné les pénates de l’atelier, qui sont comme chacun sait les divinités romaines en charge de la garde du foyer et du feu servant à faire la cuisine. Mais je ne me « plein » pas de ce vide, je le fais. L’automne sera repos et décantation. Si la peinture décante pour qu’elle ne déchante point, les projets continuent leurs appels et La Roue du Temps tourne encore dans mes crayons…

L’exposition me fit grâce d’un final inattendu. Souhaitant faire un mini-concert pour le pot de clôture, mais n’ayant pu faire venir et se rencontrer deux amis musiciens, je songeai à inviter Didier Malherbe, contacté par mail il y a 18 ans pour un projet de musique accompagnant une vidéo de mon installation à Saint Lo « Le Tour de l’Arc en Ciel ». Le projet n’aboutit pas mais le lien électronique demeura via ces Nouv’ailes. Raisonnable, je n’osai pas céder à cette envie un peu folle d’inviter ce merveilleux souffleur qui a joué dans Gong, Magma et dont je me suis beaucoup immergé dans son fameux Hadouk Trio. En général, j’aime bien aller au bout de ce genre d’intuition saugrenue, mais finalement pour une fois, timide, je n’y cédai pas. Alors imaginez l’émotion qui me submergea quand le dimanche soir de finissage, je vis entrer dans la galerie un inconnu avec un chapeau qui me dit «  Bonsoir, je suis Didier Malherbe ». Venu avec dans sa besace, son doudouk – hautbois arménien – dont il sortit une variation de Round Midnight qui me couvrit de frissons, un CD et un livre de ses sonnets, il est reparti avec le dessin Deux Noires pour une Blanche pour sceau de cet instant que l’on pourrait qualifier de «magique » si cette pensée existait… Depuis je l’écoute dans Le Cinquième Fruit, Hadouk Quartet et Hadoukly Yours. Pour les parisiens, retenez la date du 19 novembre, il jouera au Triton au Lilas.

Pour ma part, j’ai beaucoup de mal à rester très longtemps devant un écran pour visionner des vidéos, mais si 40 minutes vous semblent supportables, vous pouvez regarder celle de la conférence que j’ai donnée intitulée « Conversation d’Un Œuf avec La Roue du Temps » en suivant ce lien https://youtu.be/eEoucO0P56g

Je guette sur les rayons de la médiathèque les parutions des livres d’Arnaldur Indridasson. Cette fois-ci c’était « Le mur des silences » et toujours un vrai régal. Mes regards de lecture ont continué de se tourner vers cette terre islandaise avec la poursuite de la découverte de Jón Kalman Stefánsson, dont je vous ai vanté dans ma précédente chronique « Ton absence n’est que ténèbres ». Cette fois c’est « Lumière d’été, puis vient la nuit » paru en 2005 et traduit en 2020. Je pourrais vous dire que c’est la chronique d’un petit village des fjords de l’Ouest islandais, mais cela ne dirait rien de la magie de cette écriture fluide mais envoutante dont la réalité des pages touche de près les fictions que sont nos vies. Je préfère vous citer ce qu’en dit le site Babelio : « Le monde déborde de rêves qui jamais n’adviennent, ils s’évaporent et vont se poser telles des gouttes de rosée sur la voûte céleste et la nuit les change en étoiles. »

Pour varier les univers de lectures, et ce terme est si juste en ces temps où les univers jouent à la bascule qui rime avec bouscule, je suis retourné dans celui de Sylvie Germain où dans un faux polar, elle dissèque « La puissance des ombres » dans les dérives d’un cerveau assassin.

Pour souffler un peu, j’ai assaisonné mes endormissements nocturnes avec quelques BD de Bastien Vivès, dont le très beau et épuré Le Goût du Chlore, suivi des aventures chorégraphiques de la danseuse Polina.

Jeudi 6 octobre : la nouvelle tombe en milieu de journée et l’emplit d’une joie à faire tourner les pages et la tête. Annie Ernaux est Nobel ès Littérature. Puisse une mèche de cette nouvelle arriver jusqu’en Iran !

Je viens de commencer la lecture de « S’adapter » de Clara Dupont-Monod, prix Fémina et Goncourt des Lycéens 2021 et je suis happé dès les premières lignes par cet enfant qui n’est ni abîmé, ni inachevé, ni inadapté… Il est handicapé. Émouvant à faire parler les pierres des Cévennes.

Vu dans le flux des sorties de cinéma en manque d’entrées : Chronique d’une liaison passagère, Ennio, bel hommage à Morricone, Revoir Paris avec en parallèle et contrepoint Novembre, Ninja Baby, Les Enfants des Autres, Le Sixième Enfant et La Femme de notre Temps. Mais mon petit bijou préféré fut ce mois-ci L’Ombre de Goya, et la formidable et réjouissante opportunité de revoir et entendre le subtil Jean-Claude Carrière.

Je n’avais pas beaucoup aimé The Square de Ruben Östlund, palme d’or à Cannes en 2017. Même punition pour Sans filtre, la palme de cette année. Lourd et faussement caustique.

J’ai bien aimé la Une de Libé : « Cinéma français : la maison brûle et nous regardons Netflix » (Non, pas moi, attendant que s’épuise cette boulimie chronophage des séries, façonnage mortifère des temps de cerveaux disponibles…). « Notre seul ennemi c’est le sommeil » a déclaré Reed Hastings fondateur de Netflix.

Restons éveillés !

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QUOI DE NEUVE ? (7)

28 octobre 2022 § 0 commentaire § permalink


Savez vous quelle est la montagne préférée des peintres les veilles de vernissage ? La réponse est au bout de cette chronique.

Chronique heureuse de reprendre le Fil du Neuf et la Neuve Ligne juste avant le vernissage (demain samedi 10 septembre de 14 à 20h) de mon exposition LA ROUE ET L’ENTRE qui se tient à la Galerie du Génie de la Bastille jusqu’au dimanche 18 septembre tous les jours du mardi au dimanche où j’assure la permanence de 14 à 20h. https://www.legeniedelabastille.com/exposition/lentre-la-roue-do-delaunay/

Cerise sur les cimaises, je propose un échange de paroles et d’images autour de mon travail sous la forme d’une Conversation entre Un Œuf et La Roue du Temps. L’occasion de mettre des mots autour du silence qui se tisse entre l’œil et l’œuvre, entre les yeux et les cieux de l’art.

C’est mercredi 14 septembre à 19h à la Galerie.

Les essieux de l’été furent quelque peu secoués puisque mon carrosse déguisé en Twingo a eu la mauvaise idée de me lâcher sur la route du départ en vacances, du côté de Nevers… me contraignant à faire l’acquisition impromptue d’un nouveau véhicule prenant la forme d’un Kangoo blanc (y’avait plus de roux!), ma foi bien pratique pour transporter œuvres et matériels, même si la Twingo avait montré une belle capacité dans ce domaine. Kangoo qui va m’être bien utile pour démonter, après la fin de mon exposition, L’ARBRE À MIROIRS qui vous pouvez toujours visionner sur https://dodelaunay.com/2022/05/30/larbre-a-miroirs.html

Après les déboires nivernais et automobiles, l’été fut randonneur dans les monts du Sancy avec quelques belles installations artistiques dans le cadre du festival Horizons-Sancy. Je fus littéralement époustou-méga-soufflé par l’une d’entre elles, due à l’artiste Pier Favre que j’eus la chance et le bonheur de rencontrer in situ. Elle s’appelle Pluie de Monchal et vous pouvez la voir sur https://pierfabre.com/pluie-de-montchal

Puis l’été s’en fut en train vers l’Autriche. Le train n’était pas à Grande Vitesse, et ce fut plaisir d’oublier un instant la frénésie TGVesque pour un brin de tourisme ferroviaire se faufilant dans les vallées alpines en frôlant ce petit pays qui n’existe pas dans les aventures de Tintin et qui s’appelle le Liechtenstein. L’arrivée à Vienne claqua comme une porte fermée avec la clé restée à l’intérieur et je commençais mon séjour sur les bords du Danube par la découverte des tarifs dépannages des serruriers viennois ! Mais fi des accrocs de voyage, la semaine viennoise se coula douce avec les amis des rives danubiennes, entre les airs de La Bohème sous le ciel du château de Klosterneuburg, les peintures de Klimt et Schiele au Léopold Museum et l’univers d’Hundertwasser dans le quartier de son musée… Avant de reprendre voie vers le sud Tyrol et la région d’Innsbruck pour un symposium privé regroupant une bonne douzaine d’artistes internationaux avec comme thème le motif ô combien d’actualité « The Power of Less ». Beaucoup travaillaient la céramique, moi j’étais venu avec quelques douzaines d’œufs plâtrés et des plumes blanches et jaunes. Quatre jours de résidence à Kufstein, près de la frontière allemande, puis dix jours dans la ville de Schwaz, dans la chaleureuse et accueillante maison et le jardin extraordinaire d’Elisabeth et Hinnerkt. Avec juste le plaisir libre et gracieux de jouer, de créer et de partager. Une exposition dans la mairie de Schwaz et deux jours de restitution dans une galerie d’Innsbruck clôturèrent cette sympathique aventure dans des montagnes verdoyantes qui me firent goûter au « pouvoir de moins » de canicule !

« Cent ans de solitude » est un monument de la littérature mondiale. J’ai lu pendant une bonne partie de l’été un roman islandais qui est pour moi de la même dimension : c’est « Ton absence n’est que ténèbres » de Jon Kakman Stefánsson dont j’avais déjà lu « D’ailleurs, les poissons n’ont pas de pieds », pendant ma traversée transatlantique, il y a quatre ans. Un univers atemporel où la puissance des sentiments résonnent avec la violence des destins, où le dédale des temps tisse les liens entre écrit et récit (qui sont des anagrammes!).

Lu aussi « À l’abordage » d’Emmanuel Batamack-Tam, bel ouvrage finement ciselé avec Marivaux dans les coulisses des fausses confidences et du triomphe de l’amour. Lu aussi avec plaisir et à voix haute les 22 chants d’une préhistoire rêvée dans le récent livre de Bartabas intitulé Les Cantiques du Corbeau. Matière poétique à dire le rapport à l’animal qui travaille tant notre époque.

Cherche Adam et rêve ! (Proverbe androgyne).

Après un long sevrage estival, j’ai repris, pour adoucir le retour à la grande ville le chemin des salles obscures avec As Bestas, La nuit du 12, Les cinq diables et Flee. Et avant d’aller voir Revoir Paris le film d’Alice Winocour qui est sorti avant hier, j’ai écouté Trois voix pour un procès, podcast de France Inter où une journaliste, un avocat et une victime des attentas du 13 novembre mêlent leurs voix et leurs témoignages à partir de messages audio partagés tout au long du procès.

Entendu à la radio la naissance d’un nouveau mot : infobésité. Et n’espère pas en être avec ce p’tit grain d’sel du 9 septembre. 

Demain c’est le 10, jour de vernissage. Aujourd’hui, j’ai une préférence pour le Mont Ventoux.

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Exposition L’ENTRE & LA ROUE

5 septembre 2022 § 0 commentaire § permalink

Bonjour,
J’ai plaisir à vous inviter à  mon exposition L’ENTRE & LA ROUEqui se tient du 6 au 18 septembre à la Galerie du Génie de la Bastille126 rue de Charonne 75011 Paris, tous les jours du mardi au dimanche de 14 à 20h

Vernissage le samedi 10 septembre de 14 à 20h


Le mercredi 14 septembre à 19h, je vous propose un moment d’échanges et d’images autour de mon univers artistique.
Au plaisir de croiser vos regards

QUOI DE NEUVE? _6

9 juin 2022 § 0 commentaire § permalink

Le souffle des miroirs.

Je me repose sur lui dans la lumière de l’atelier et accessoirement dans l’évasion de quelques salles obscures ou les rebonds émotifs des balles de tennis. Après l’intense boulot de L’ARBRE À MIROIRS, la pression est retombée et le plaisir de cette réalisation continue de diffuser ses reflets dans le quotidien de ce printemps. Je ne résiste pas à vous joindre de nouveau quelques images prises dans ces soirées de mi-mai où la pleine lune a baigné de ses rayons les collines champenoises et les lignes de vignes. En attendant la vidéo que je vais monter pour donner à voir les balancements or et argent de l’Arbre, vous pouvez en savoir un peu plus en suivant ce lien https://www.vignart.fr/evenements/chavot-courcourt/

Au retour de Champagne, j’ai enchainé sur l’organisation et la participation à l’exposition Le Génie de l’Estampe à la Galerie du Génie, dans le cadre de la journée européenne Manifestampe. Y ai exposé une dizaine de gravures et pour cette occasion, des essais de gaufrages à partir de plaques de zinc découpés à l’acide en forme de Roue du Temps.

Au programme artistique de l’été, une invitation à un symposium de land-art privé du 1 au 15 aout en Autriche dans la région d’Innsbruck sur le thème The Power of Less. Le Pouvoir du Moins. Y a t-il meilleur programme pour nos sociétés surabondantes qui mesurent chaque jour un peu plus les limites et les fragilités de nos modernités ? Mais le rendez-vous qui se prépare actuellement dans les soutes de l’atelier sera pour septembre avec mon exposition à la Galerie du Génie intitulée « L’ENTRE & LA ROUE ». Ce sera du 6 au 18 septembre avec vernissage le samedi 10. À vos agendas !

La naissance des seins. J’ai toujours bien aimé cette expression à fleur de peau à la fois anatomique et temporelle. Qui relie le corps et le temps. En corps, c’est la ligne ondulante qui signe le liseré du décolleté, dessine la lisière de la gorge. Dans le temps c’est la période d’apparition de ces formes qui montre la passage de la fille à la femme, l’âge de la puberté qui ouvre à la reproduction du monde.

Je n’ai pas parlé cinéma dans mes précédentes Nouv’ailes pour cause d’ARBRE À MIROIRS. Mais si par bonheur vous le croisez sur une affiche, allez voir Il Buco, un somptueux documentaire italien de Michelangelo Frammartino qui lie l’exploration spéléologique d’une grotte italienne profonde de 687m – l’abîme de Bifurto – et la mort d’un vieux berger calabrais. Vu deux fois, j’en suis sorti avec la sensation d’une caméra qui creuse l’obscurité de l’écran avec la lumière de ses images. Comme une faille de clarté dans le sombre de la terre, une fssure de jour qui traverse la nuit des temps.

Bien aimé aussi Les Passagers de la Nuit de Mikhaël Hers, Frère et Sœur d’Arnaud Desplechin, L’École du Bout du Monde (au Bhoutan, à 4800m d’altitude!) de Pawo Choyning Dorji, un beau documentaire – Birds of America – sur le naturaliste français Jean-Jacques Audubon, émigré aux USA dans la première moitié 19ème siècle et tellement célèbre là- bas qu’il est devenu John James Audubon et Clara Sola de la suédo-costaricaine Nathalie Mesén. Et pour fnir cette sélection printanière, une pépite nommée Limbo du réalisateur espagnol Ben Sharrock. L’histoire de migrants dont un syrien qui ne se déplace jamais sans son oud, qui attendent dans le nord de l’Écosse un hypothétique visa. Dans la forme et dans le fond, une merveille de cinéma grave, drôle et profond.

Si vous passez par la capitale d’ici le 29 août, allez contempler l’exposition de Simon Hantaï à la Fondation Vuitton. La peinture dans de beaux draps et bien mise en plis…

Dans mes lectures, tout le mois de mai a défilé dans les pages de la trilogie de la vallée de Baztan écrite par la romancière espagnol Dolorès Redondo : Le Gardien Invisible, De Chair et d’os et Une offrande à la tempête. Une intense saga policière entre Navarre et Pays Basque.
Et pour changer d’univers, Le Serrurier Volant de Tonino Benaquista illustré par Tardi et le premier roman de Pierre Lemaître, Le Serpent Majuscule qui vient d’être publié.

Certains matins, j’ai mal au monde. Ma rage reste intacte et présente mais fait silence face aux délires et aux mauvaises fois russes, aux déforesteurs d’Amazonie et autres tortionnaires des Ouïgours. Je serre au chaud dans mes bagages d’été quelques graines d’optimisme pour protéger et soigner les humeurs de mon regard.

Je termine cette chronique en écoutant Jean Michel Maulpoix qui va recevoir prochainement le prix Goncourt de la poésie. Il cite un poète récemment disparu, Michel Deguy, fondateur de la revue Po&sie, qui a inventé le mot « géocide » avec lequel il nous faut désormais vivre. Mais il a cité aussi René Char qui a dit « les poètes tirent des salves d’avenir ».

Alors armons-nous d’avenir. Alors aimons-nous d’avenir.

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QUOI DE NEUVE?_5 : L’Arbre à Miroirs pour faire pétiller la Champagne !!!

16 mai 2022 § 0 commentaire § permalink

Vendredi 13 mai, commune de Chavot-Courcourt, à 5 kilomètres au sud d’Épernay.

L’ARBRE À MIROIRS est désormais installé au cœur des vignes, dans le pays de Champagne.

VENDREDI 6 MAI

L’intense travail de préparation des 432 miroirs Or & Argent est terminé. Ils mesurent 184mm de côté, sont fxés avec des colliers Serfex sur les treillis de fer à béton peints en noir et doré, et agrémentés de petits morceaux de reliure plastique pour qu’ils restent bien centrés dans les mailles de 200 mm. Le tout est enrubanné de flm plastique pour faciliter le transport.

J’ai aussi préparé les tubes d’acier qui vont être enfoncés en terre pour accueillir les fers à béton de ø14mm qui vont structurer le tronc de l’arbre. Préparé aussi les deux «brancards » de 5m de long qui vont servir pour élever les six bandes de treillis de 4,80m de long. Lesquelles bandes sont faites de deux treillis de 3,20m de long et 0,6m de large qui se superposent sur une longueur de 80cm.

Tous ces préparatifs m’ont valu quelques insomnies matutinales, période faste avant l’aube pour « checker » tous ces petits détails qui font les grands bonheurs de réalisation. Et cela, dans la plus grande autonomie possible. Détail qui ason importance : il n’y a pas d’électricité sur le terrain. Au matin du 6, le camion loué emmène tous ces matériaux pour les déposer à la mairie de Chavot-Courcourt. Pour le transport sur le site, à 2km de là, la Twingo et sa modeste galerie feront l’affaire. Idem pour l’échelle double que la commune met à ma disposition.

DIMANCHE 8 MAI

Les outils sont dans la voiture, la petite échelle pliante, les tréteaux, les tubes, les ligatures métalliques aussi. Je retrouve mon ami artiste Alain Mila qui vient aussi installer son œuvre à Moslins, pas loin de là. Pour lui c’est une quarantaine de manches à air qui vont animer le ciel champenois.

LUNDI 9 MAI

Premier challenge sur site. Comment vont s’enfoncer les six tubes d’acier ? Ouf, ouf !!! La terre n’est pas trop sèche, masse et barre à mine font un bon avant-trou, la pièce de bois pour taper sur le tube tient le coup et les six fers à béton dressent leur 2,50m au dessus du sol. « L’escalade » peut commencer ! Assembler les treillis numéro 1 et 4, qui occupent deux des faces opposées du tronc hexagonal, les positionner sur les deux brancards. La journée s’achève, la tentation d’essayer en solo l’élévation d’un brancard est grande mais la raison raisonnable l’emporte. Je vais demander l’aide de mon camarade artiste pour bien commencer la journée de mardi.

MARDI 10 MAI

Les deux brancards sont levés puis enlevés. Mauvaise surprise : la fexibilité des treillis est grande, trop grande et le haut des treillis retombe comme une branche de saule pleureur, ou de palmier. Il va falloir se battre contre la gravité, moi qui aime être un artiste-hauteur. J’aime quand les regardeurs lèvent les yeux au ciel pour s’envoyer en l’air avec la poésie de mes installations. L’après-midi, deux employés de la commune viennent me prêter mains fortes pour élever les treillis n°2 et 5, puis les n°3 et 6. Maintenant ça ressemble vraiment à un palmier-pleureur, ou à une bouteille de champagne qui vient de faire jaillir ses bulles carrées d’or et d’argent. Y’a de la nécessité de réglages et fignolage dans l’air !!!

MERCREDI 11 MAI

J’essaie de relier le plus haut possible les treillis du tronc. Je tente un équilibrage des couples de branches avec des câbles d’acier mais rien n’y fait. Le haut du tronc vrille et se déforme, les treillis ne s’élèvent guère davantage. Je fais une pause réflexive et en profite pour m’amuser de mon reflet démultiplié dans les carrés de miroirs et croque en photos quelques «autoportraits aux réglages ».
Puis je coupe tous les câbles, la fleur des treillis éclate et retombe. Heureusement les treillis font preuve de grande souplesse, leur défaut devient qualité. Je me résous aux grands moyens : il faut rehausser les six arêtes verticales du tronc. Moi qui avais acheté trop de fers à béton me réjouis de cette étourderie. Les six fers supplémentaires vont dépasser de 60cm le haut du tronc, il ne reste plus qu’à venir y fixer les six treillis. Béni soit l’inventeur du lieur qui permet d’assembler par ligatures de fer recuit barres et treillis. L’ARBRE À MIROIRS prend désormais forme et retrouve ainsi une érection bien verticale : le résultat ressemble au dessin du projet et je suis content et satisfait. Et bien fatigué, les reins en compote et les avant-bras un peu estafilés.

JEUDI 12 MAI

La matinée est consacrée au rangement du site et de la voiture, au démontage des brancards, aux coupes des ligatures qui dépassent, au retour de l’échelle à la mairie et à mon interview de présentation pour le site du Festival Vign’Art. https://www.vignart.fr/
La lumière n’est pas terrible, d’autres photos attendront demain. Je suis heureux du travail accompli. Mes inquiétudes quelque peu chroniques ont été vaines et je jouis d’une joie intime, dense et profonde au cœur de ce moment de solitude « au pied de mon Arbre » en fredonnant la chanson de l’ami Georges B. Juste avant d’offrir cette colonne de lumière aux pétillements de vos regards et de celles et ceux qui viendront s’y mirer. Et ce jusqu’au 15 septembre 2022. Si vous passez par là, faites-moi signe et envoyez moi une photo, reflet de ce joyeux mirage.

« Nous sommes ce que nous attendions » proverbe Hopi dit en interview radio par Cyril Dion qui a cité aussi Rilke : « Soyez vous-même car les autres sont déjà pris ».

« On apprend l’eau par la soif, et la terre par le voyage en mer, la passion par les affres et la paix par les récits de guerre ; l’amour par la mort et les oiseaux par l’hiver » a écrit Emily Dickinson cité par Christian Ingrao directeur de recherches au CNRS et enseignant à Sciences Po Paris qui ajoute « on apprend par le manque et par la carence, on apprend par l’absence. Peut-être l’Europe apprend-elle par la souffrance en Ukraine ».

Il s’appelait Jacques A Bertrand. Il a commis en 1983, avant d’autres multiples écrits un joli petit bouquin sur les signes du zodiaque qui s’appelle « Tristesse de la Balance et autre signes ». Il était drôle, fin et élégant, avait travaillé pour Télérama et France Culture. Depuis le 18 avril, il n’a plus de poux pas papous dans la tête.

Il est des mois où la convergence des lectures rassemble de belles pages diverses et variées : il en est ainsi de ce printemps de lecture dont je ne vous donne que titres et promesses de bonheurs lus : Rosa Candida de l’islandaise Audur Ava Ólafsdóttir. Impossible d’Erri de Luca. Solak de Caroline Hinault. Mon Mari de Maud Ventura. Là où chantent les écrevisses de Delia Owens.

Cette semaine champenoise s’est déroulée dans de bonnes conditions météorologiques. Mais « bonnes » est-il le « bon » mot alors que planent de plus en plus vertigineusement les menaces de sécheresse ? Dans nos contrées, il est commun de dire il fait «beau» quand le soleil brille, il fait «mauvais» quand le temps est à la pluie. Or dans le Yi Jing, qui m’a appris que l’automne était aussi nécessaire que le printemps et qui code la disposition des miroirs Or & Argent de mon ARBRE À MIROIRS, c’est la pluie, le Ciel venant féconder la Terre, qui est faste. Noptre contrée, maintenant c’est la planète. Alors chérissons la belle pluie…

Et que L’ARBRE À MIROIRS puisse éclairer et refléter le bon et le beau du temps.

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QUOI DE NEUVE ? _4

16 mai 2022 § 0 commentaire § permalink

L’ARBRE A MIROIRS prend doucement forme dans l’atelier bien occupé. Heureusement le bout de square qui le jouxte me permet de faire en extérieur les premières ébauches de montage de la structure métallique qui va accueillir les 432 carrés de miroirs Or et Argent.

Je vous joins la liste des courses : 4 treillis à béton de maille 20cm. 12 fers à béton ø14mm de 3m de long. 216 miroirs carrés de 184mm de côté en plexiglas Or, autant en Argent. 864 colliers transparents Serfex de 10cm. 6 tubes d’acier ø35mm de 60cm de long. Du câble et des chaînettes d’acier, des ligatures métalliques, de l’antirouille noir et une bombe de peinture dorée.

Si toute la préparation se fait à l’atelier, l’installation proprement dite aura lieu du 8 au 15 mai prochain. Ce qui provoquera peut-être un léger décalage de la parution des prochaines nouv’ailes. L’implantation se fait dans les vignes de la commune de Chavot-Courcourt, à 5km au sud d’Épernay, dont j’ai appris que les habitants s’appellent les sparnaciens. (on peut voir ce site sur https://www.vignart.fr/evenements/maison-gosset/ ). L’inauguration de cette manifestation qui se déroule sur 18 sites de ce vignoble aura lieu le dimanche 15 mai.

Entendu une passionnante interview de l’archéologue préhistorien Jean Paul Demoule qui vient de publier aux éditions Payot son livre Homo migrans, une histoire globale des migrations qui tord le coup à bien des idées reçues et affirme haut et fort que depuis l’aube de l’humanité, nous avons toujours été des migrants. Au-delà des multiples raisons qui donnent naissance à ces migrations, que produisent-elles ? Des rencontres, des imprévus, des découvertes comme celles décrites dans Calais mon Amour le livre de Béatrice Huret, qui a inspiré le flm de Jérémie Elkaïm Ils sont vivants, belle histoire d’amour franco-iranienne joué par Marina Foïs et Seear Kohi. Sans aucune naïveté en cette époque où Crimée rime avec crimes contre l’humanité et Ukraine avec massacres à la haine, il semble important de réaffirmer que ce qui rend malgré tout, fécondes ces migrations forcées ou volontaires, c’est cette énergie vitale que l’on nomme amour, altruisme, désir d’altérité, ouverture à l’autre, tous ces noms qui disent un irréductible humanisme.
L’amour contre toutes les armures…

Dans les films du mois, en haut de la pile je mets L’ombre d’un mensonge de et avec Bouli Lanners, fin et subtil et Seule la Terre est éternelle de François Burel et Adrien Soland autour et avec l’écrivain Jim Harrison et les paysages d’une traversée de l’Ouest américain.
On ne peut pas dire que Notre Dame brûle de Jean Jacques Annaud est un grand flm, mais c’est un impressionnant document dont j’avais envie de voir le feu…
Dans les autres films, le formidable et dense En Corps de Cédric Klapisch qui danse entre classique et contemporain. À voir aussi Le monde d’hier de Diastème, pas forcément pour l’intrigue mais plutôt pour le rendu de l’ambiance des couloirs et dédales des allées et alcôves du pouvoir… Histoire de méditer sur les vanités de ce monde …
Un très beau rôle pour Karine Viard dans Une Mère, qui veut se venger de l’assassin de son fils avant de cheminer vers les chemins du pardon…

Je n’ai pas lu Les Petits chevaux de Tarquinia de Marguerite Duras, mais ai bien aimé le flm Azuro de Mathieu Rozé, inspiré par ce livre. Une goutte de plage et de soleil en ce début de printemps frisquet.

J’avais vu ce flm d’Alain Cavalier – Un étrange voyage – à sa sortie en 1980 avec Jean Rochefort et Camille de Casabianca quand je faisais quelques critiques de cinéma sur les ondes de Radio France Pays de Loire. Il est de nouveau visible sur le site d’Arte et n’a pas pris de rides ! Je me suis régalé à la revoyure ! https://www.arte.tv/fr/videos/107360-000-A/un-etrange-voyage/

J’avais aimé la sage du policier Harry Hole écrite par le norvégien Jo Nesbø. Celle-ci s’est close mais ce romancier poursuit son œuvre. Après Macbeth qu’il a revisité, il vient de publier Leur Domaine, roman noir d’une saga de deux frères en prise avec leur secrets et leur passé.
Autre violence, celle des narcos de Colombie que décrit Caryl Férey dans son roman Paz. Est-ce bien raisonnable de lire de tels livres en ces temps assombris et plombés d’obus obtus qui tuent? Alors, si vous voulez de la douceur de lire, préférez Ce que Frida m’a donné de la vénézuélienne Rosa Maria Unda Souki, joli roman graphique autour de l’œuvre de Dame Kalho publié aux éditions Zulma. Un régal pour les yeux de l’esprit.

Le ton de cette nouv’aile dit en creux la couleur de mon printemps : une occupation créatrice qui emplit les bras de faire, des échappées lectrices et cinéphiles pour me tenir debout et garder distance avec les affres de l’actualité.
Et le baume de votre partage de ces états traversés dans l’envers et l’échange des écrans.

Ce qui est aussi une autre forme d’un arbre à miroirs. J’y accroche les mercis de votre lecture.

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QUOI DE NEUVE? _3

9 mars 2022 § 0 commentaire § permalink

Murmuration.

C’est le nom que l’on donne à ces rassemblements d’oiseaux qui dessinent dans les nues ces volutes mouvantes si belles qu’on en reste sans voix. Si majestueuses qu’on ne peut qu’en interroger le mystère et s’émerveiller devant ce phénomène d’intelligence collective dont vous pouvez voir un exemple dans la quatrième image de ces Nouv’ailes captée il y a quelques jours dans le port de Saint-Nazaire.

Murmuration, cela résonne comme un son qui serait encore plus feutré qu’un simple murmure. Un souffle qui frôlerait le mur du silence. Exactement le contraire du cri tonitruant qui voulut sortir de ma gorge au matin du 24 février. Et qui ne cesse pas. Et dont je n’écrirai rien de plus, tellement l’horreur est profonde. Je laisserai juste dans la première image de cette chronique le vent souffler dans les plis jaune et bleu du drapeau ukrainien qui rime avec européen.

Dire qu’on ne sait toujours pas pourquoi on entend la mer en écoutant les coquillages ! Peut-être que les oiseaux le savent ?

En rentrant de ce bord de mer, devisant avec un ami-frère à propos de nos chansons préférées, accord se fit au bord de la chaleureuse cheminée, sur le poème d’Antoine Pol, Les Passantes mis en musique par Brassens et repris par Cabrel et Le Forestier et … par une fanfare sud-américaine que la radio diffusa juste à ce moment-là ! Une telle synchronicité ne fait pas preuve, mais quand même, Les Passantes, c’est vraiment la crème des crèmes des belles chansons !

Rien de tel pour conjurer la plombante actualité que l’art et la création. Surtout quand il et elle sont fortement dynamisées par l’annonce de ma sélection pour VIGN’ART 2022 avec le projet L’ARBRE À MIROIRS, décrit dans l’image n°2. Il sera installé fin avril ou début mai dans les vignes champenoises du site de Chavot-Courcourt, au sud d’Épernay.
En attendant, je participe la semaine prochaine avec plus d’une vingtaine d’artistes à l’exposition Le Printemps des Poètes qui se tiendra à la Galerie du Génie de la Bastille du 15 au 20 mars. Cette année, le thème est L’ÉPHÉMÈRE. Je serai présent à la Galerie lors du vernissage, le mercredi 16 à 18h et le vendredi 18 mars, de 17 à 20h.

Le Printemps des Poètes 2022 – L’Ephémère

J’avais beaucoup aimé Le Dernier Lapon, roman ethno-policier d’Olivier Truc. J’ai adoré la suite, Le Détroit du Loup. Où l’on continue de débusquer derrière la belle image social-démocrate de la Suède à la rigueur toute protestante, les ravages que celle-ci a infligés à la culture sami pour l’éradiquer du grand nord scandinave.
Mais l’encore plus grande émotion de lecture de ce mois fut celle de Je suis pilgrim de l’anglo-australien Terry Hayes qui est aussi scénariste. Entre polar et espionnage, djihadisme et menace chimique, Échelon et variole, entre New York et Afghanistan, Turquie et Arabie Saoudite, une formidable construction narrative, addictive et haletante… Chaudement recommandé !!!

Côté film, arrive en premier Un Autre Monde de Stéphane Brizé. Échangeant quelques mots avec mon inconnu voisin de séance, nous nous réjouîmes de concert d’avoir échappé au monde de l’entreprise… En espérant ne jamais être malade du côté de Shanghaï, où pendant plusieurs mois, la franco-chinoise Yé Yé a suivi dans son documentaire H6 cinq familles soignées dans un des plus grands hôpitaux de cette ville. Entre modernité et tradition, humour, détresse et solidarité, un étonnant portrait de cet univers médical chinois.
J’ai aussi vu et aimé Histoire d’un scandale d’État de Thierry de Peretti, le très beau conte italien Piccolo Corpo autour de la maternité et de la rédemption et la toujours impeccable Adèle Exarchopoulos, hôtesse de l’air d’une compagnie low-cost dans « Rien à Foutre » d’ Emmanuel Marre et Julie Lecoutre. Je ne connaissais rien d’Ulrich Zwingli, réformateur suisse contemporain de Luther et Calvin que j’ai découvert dans le film éponyme de Stefan Haupt.
Dans un film, en particulier dans les documentaires, je me demande souvent où était placée la caméra au moment de la prise de vue. Quels artifices furent pris pour donner l’illusion d’un « sur le vif ». Ceci est particulièrement vrai dans le « cadre » des documentaires animaliers et des prouesses de captation qu’ils suggèrent. C’est le cas dans le film Le Chêne qui explore la vie dans, autour et sous les racines et branches de ce roi de la forêt.

En Chine Ancienne, il était dit que les oiseaux étaient une belle image de l’adéquation au moment puisque possédant un degré de liberté de plus que nous – le vol – ils se posaient toujours là où il le devaient. Aujourd’hui où les drôles de drones qui décollent permettent de voir le monde depuis le haut du ciel, gagnera-t-on un vrai degré de liberté ?

Au vu de l’actualité, on ne le croirait pas mais nous sommes bien désormais en l’an 22 du 21ème siècle. J’espère que vous avez bien fêté le palindrome du 22022022. Le prochain est prévu pour le 03022030…
Pour parler d’une époque lointaine, on évoque souvent « la nuit des temps ». Mais c’est quand, « LA NUIT DES TEMPS » ?
La réponse est dans son anagramme : c’est « DEMAIN, PLUS TEST ».

Alors essuyez le printemps ! Enfin, essayez…

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